Décision UFC-QUE CHOISIR c. VAVLE : vers la consécration d’un marché de l’occasion des jeux vidéo dématérialisés ? (TGI Paris, 17 septembre 2019, RG 16/01008)

Le Tribunal de Grande Instance de Paris a rendu le  17 septembre 2019 une décision à l’encontre de la société VALVE dans le cadre d’une procédure initiée fin 2015 par UFC-Que Choisir.

Le tribunal a considéré que plusieurs clauses figurant dans les conditions générales de la plateforme Stream gérée par VALVE étaient abusives. Parmi celles-ci, outre les clauses régulièrement considérées comme illicites dans le secteur du numérique (clause d’attribution de juridiction, clause relative aux comportements répréhensibles des utilisateurs ou encore dispositions relatives à la protection des données à caractère personnel), a été déclarée illicite la clause interdisant la revente du compte créé et/ou des jeux vidéo acquis sur la plateforme de vente en ligne.

Pour le tribunal, cette clause va à l’encontre du principe d’épuisement des droits posé par la directive de 2001 sur le droit d’auteur et par la directive de 2009 sur les logiciels. En vertu de ce principe, le titulaire de droits de propriété intellectuelle sur un produit épuise son droit exclusif de distribution lors de la première mise en circulation au sein de l’UE et ne peut s’opposer à la libre circulation du produit.

En effet, pour le tribunal, même si la transposition qui en a été faite en droit français dans le Code de la propriété intellectuelle conditionne ce principe à l’existence d’un exemplaire matériel, l’épuisement du droit de distribution au sens du droit de l’Union n’est aucunement subordonné à l’existence d’un support physique.

L’épuisement du droit de distribution ne pouvant intervenir qu’en cas de vente, le tribunal complète son raisonnement en considérant qu’en l’espèce l’opération s’analyse comme une vente malgré l’utilisation du terme « abonnement » dans les conditions générales de VALVE dès lors que le jeu est mis à la disposition de l’utilisateur pour une durée illimitée, moyennant un prix déterminé à l’avance et payé en une seule fois.

En conséquence, le tribunal déclare non-écrite la clause interdisant la revente des jeux vidéo, VALVE ayant épuisé son droit de distribution lors de la vente, fût-elle dématérialisée, et ne peut en conséquence interdire leur revente ultérieure.

Cette décision constitue un pas important vers la création d’un marché de l’occasion des jeux vidéo dématérialisés, d’autant plus qu’UFC a annoncé dans le prolongement de cette décision vouloir étendre son action à d’autres plateformes de jeux vidéo.

Néanmoins, le sujet n’est pas définitivement clos dès lors que la décision n’est pas assortie de l’exécution provisoire et que VALVE a annoncé son intention d’interjeter appel.

L’issue finale pourrait aussi être encore retardée si VALVE décidait de soulever une question préjudicielle devant la Cour de justice de l’Union européenne.

Si elle venait à être confirmée, cette décision aurait sans aucun doute un impact important sur le secteur des jeux vidéo puisque tant les plateformes que les éditeurs devraient alors composer avec un marché parallèle de l’occasion des jeux vidéo dématérialisés jusqu’à présent inexistant.








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